Deux jours fériés supprimés en 2026 : une baisse de salaire déguisée ?
L’annonce a fait l’effet d’une bombe : pour soutenir les finances publiques, François Bayrou propose de supprimer deux jours fériés dès 2026. Objectif affiché : augmenter le nombre de jours travaillés afin de générer 4,2 milliards d’euros d’économies pour l’État. Une idée qui, sur le papier, ne touche pas à la fiche de paie. Mais dans les faits, que perdent vraiment les salariés ?
Travailler plus… pour le même salaire
Les deux dates concernées sont symboliques : le lundi de Pâques et le 8 mai, traditionnellement chômés. Si la proposition devient réalité, ces jours deviendraient ouvrés, sans compensation financière. Les employés continueraient donc à toucher leur salaire mensuel habituel. Aucune baisse apparente du revenu brut ou net. Pourtant, ce changement revient à travailler plus pour un revenu identique, ce qui diminue mécaniquement le revenu horaire réel.
C’est un peu le même principe que la journée de solidarité instaurée en 2004, où le lundi de Pentecôte est devenu un jour travaillé sans rémunération supplémentaire. Une contribution équivalente à 0,3 % de la masse salariale est alors versée par l’employeur à l’État. Cette logique pourrait s’étendre à ces deux nouveaux jours.
Du temps libre en moins, un équilibre fragilisé
Même sans baisse officielle de salaire, les conséquences sont concrètes : deux jours de repos en moins par an, ce sont autant de week-ends prolongés supprimés, de temps libre réduit, d’occasions familiales compromises. Pour beaucoup de Français, cela pourrait représenter une dégradation du rapport effort/rémunération.
Si le pouvoir d’achat reste identique sur le papier, l’effort demandé, lui, augmente. En d’autres termes, la productivité attendue augmente sans que le salaire suive, ce qui nourrit un sentiment d’injustice. Cela alimente aussi une frustration croissante à l’heure où l’équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle est devenu un enjeu majeur.
Des impacts inégaux selon les secteurs
Bien entendu, tous les salariés ne seront pas touchés de la même manière. Dans certains secteurs comme le commerce, l’hôtellerie ou l’artisanat, ces jours sont souvent déjà travaillés. Pour eux, l’effet sera minime. À l’inverse, dans les entreprises soumises aux rythmes traditionnels, la mesure pourrait être perçue comme une perte nette.
Les salariés en forfait jours ou bénéficiant d’accords internes plus flexibles pourraient également amortir le choc. Mais dans l’ensemble, la réforme risque d’intensifier la charge de travail pour une majorité d’actifs, sans bénéfice visible.
Une mesure symbolique qui divise
Ce projet, s’il est voté, risque de devenir un marqueur fort du quinquennat Bayrou. Il ne s’agit pas simplement d’un ajustement technique : c’est une décision qui touche à la valeur du travail, au temps personnel, et à la perception de l’équité sociale.
Dans un climat déjà tendu autour du pouvoir d’achat, cette proposition soulève une question fondamentale : comment faire participer les citoyens à l’effort collectif sans détériorer leur qualité de vie ? Supprimer des jours fériés peut sembler mineur aux yeux de certains, mais pour d’autres, c’est une goutte de plus dans un vase déjà bien plein.
